Egalité
Egalité des sexes
Après les roses, les épines. Editorial
Le Courrier, du 9 mai 2007, FABIO LO VERSO
Combattre les discriminations fondées sur le sexe, s’attaquer aux inégalités salariales et sociales entre les femmes et les hommes? Ne serait-ce que des mots? Les restrictions que subissent subrepticement, depuis des années, les Bureaux de l’égalité en Suisse romande viennent d’obtenir un écho utile avec l’affaiblissement du service jurassien, le premier à avoir fait son apparition dans le pays, en 1979. Sa dotation financière a été drastiquement réduite hier par le gouvernement du canton. Et ce n’est là que la pointe de l’iceberg. La voilure a été rétrécie partout ailleurs, à l’exception de Genève et Vaud (pour combien de temps encore?), au prix d’un recul des prestations et des campagnes de sensibilisation sur les nombreuses disparités qui entachent toujours la société helvétique. Le cas jurassien n’est que l’ultime épisode d’une dégringolade inquiétante. Il reste à espérer qu’il déclenchera un mouvement d’indignation, unique moyen de ramener le politique à ses engagements.
Comment en est-on arrivé là? Les causes sont sous les yeux de tous. Elles relèvent à la fois de l’impéritie des exécutifs et de l’absence de volonté de prendre le problème à bras-le-corps. Les échecs résonnent comme une gifle, mais qui ressent véritablement la douleur? Qui assume, par exemple, la responsabilité du recul de la représentation féminine en politique? En 1997, la Suisse figurait au 16e rang mondial, l’an passé elle n’était plus qu’en 28e position, derrière le Mozambique, le Burundi, les Seychelles, la Biélorussie, le Vietnam, l’Afghanistan et l’Irak. Sur un autre versant, celui de la rémunération salariale, il n’est pas inutile de rappeler que le pays est à la traîne. Les écarts sont encore importants entre femmes et hommes. Régulièrement, la Suisse subit l’humiliation d’être pointée du doigt, aussi bien dans l’enceinte onusienne que dans les cercles internationaux.
Lancée avec de belles promesses, la machine helvétique s’est enrayée. Et pourtant, le pays a réagi relativement tôt à la discrimination entre les sexes. Preuve en est la création en 1979, en avance sur ses voisins, du Bureau de l’égalité jurassien. Après le temps des roses, voici venu celui des épines. Il est d’autant plus frustrant de faire un tel constat que rien ne permet de le renverser. La prise de conscience des Suisses semble s’être estompée au fil du temps, si l’on en croit certains sondages. Les politiques ont jeu facile de trouver une justification à ce reflux: la faiblesse des finances publiques. Cette volonté normalisatrice qui vise à tout mesurer sur l’étalon budgétaire a conquis les esprits. Les femmes doivent désormais davantage se battre contre les répercussions du néolibéralisme ambiant que contre les inégalités inhérentes à la persistance de mentalités discriminatoires. Il y a là une nouvelle frontière que les groupes de pression en faveur de l’égalité devront parcourir à la recherche d’une nouvelle brèche. Il en va de la survie de leur combat.
L’égalité vue par Martine Chaponnière